La Banque mondiale a dévoilé, ce mardi 1 juillet à Conakry, son rapport de suivi de la situation économique en Guinée, intitulé : « Mobilisation et gestion des ressources intérieures pour le développement inclusif et durable ». Selon les données, malgré une croissance économique robuste, la pauvreté persiste et ses bénéfices ne profitent pas à tous. La publication du document a rassemblé des représentants diplomatiques, d’anciens Premiers ministres et ministres, ainsi que des cadres de l’administration.
Ce rapport, qui offre une vue d’ensemble de la situation macroéconomique du pays et une analyse approfondie des défis, souligne que la Guinée a enregistré une croissance moyenne du PIB de 5,2% entre 2019 et 2024, principalement tirée par l’industrie minière. Cette tendance devrait se renforcer avec l’entrée en production du minerai de fer de Simandou.
Cependant, le représentant du groupe de la Banque mondiale en Guinée, a noté que cette croissance n’a pas été aussi inclusive, mais aussi à la hauteur des attentes. ‘’Il est devenu évident que la croissance robuste du PIB de la Guinée ne s’est pas automatiquement traduite par une vaste création d’emplois ou une réduction de la pauvreté. La croissance n’a pas été aussi inclusive qu’on aurait pu l’espérer et le taux de pauvreté reste élevé’’, a souligné Issa Diaw.
Le défi de la mobilisation des ressources intérieures
Un point central du rapport est le faible niveau des recettes fiscales, qui ne représentent que 13% du PIB, bien en deçà du seuil de 15% jugé nécessaire pour soutenir une croissance à long terme, et loin de l’objectif de convergence de 20% de la CEDEAO.
‘’Le paradoxe guinéen est donc clair. Une croissance économique robuste, mais une pauvreté persistante, une transformation structurelle lente et une dépendance du secteur au secteur extractif. La Guinée ne pourra satisfaire ses besoins de développement sans une mobilisation accrue et une gestion optimisée de ses ressources intérieures. Aujourd’hui, les recettes fiscales représentent seulement 13% du PIB. Un niveau inférieur au seuil de 15% considérés comme nécessaires pour soutenir une croissance à long terme et bien au-dessous de l’objectif de convergence de 20% de la CEADEO’’, a indiqué M. Diaw.
Pour lui, ‘’cela limite fortement la capacité de l’État à financer des services de qualité pour les citoyens et les entreprises. Le déficit budgétaire s’est creusé en 2024. Tandis que la dette publique a augmenté avec une croissance de dette intérieure moins concessionnaire, les marges de manœuvre budgétaire sont donc sous pression’’.
Face à ce constat, le rapport insiste sur l’urgence de réformes visant à améliorer la mobilisation et la gestion des ressources intérieures. Il recommande le renforcement de la coordination entre les parties prenantes de la fiscalité, la modernisation de l’administration fiscale et d’assurer une meilleure transparence dans la gestion des dépenses publiques. Pour la Banque mondiale, ces réformes sont cruciales pour élargir l’espace budgétaire et renforcer la résilience économique de la Guinée.
Une vision partagée pour l’avenir
Dr. Mamoudou Touré, secrétaire général du ministère de l’Économie et des Finances, a salué le partenariat stratégique avec la Banque mondiale, rappelant que l’institution est un acteur majeur dans le financement du développement en Guinée. Il a souligné la résilience de l’économie guinéenne, notamment après l’incident du dépôt pétrolier de Kaloum, et a réaffirmé la nécessité de mobiliser davantage de ressources internes pour financer les projets structurants et améliorer les conditions de vie des populations.
‘’Cet atelier arrive dans un contexte où l’État guinéen est en train de finaliser la traduction de la vision des hautes autorités à travers le programme Simandou 2040 autour des 5 piliers dont chacun de nous connaît. Mais ces 5 piliers ne peuvent pas être mis en œuvre lorsque les efforts nationaux ne sont pas portés à un niveau encourageant, à un niveau qui incite les autres partenaires à mettre de l’argent, du financement aussi à la disposition de notre pays’’, a souligné Dr Touré.
Il espère que ‘’les échanges seront très enrichissants pour l’ensemble des participants et que nous sortirons de cette discussion avec des pistes de réformes qui permettront à notre pays d’aller tout droit vers la trajectoire de son émergence à l’horizon 2040’’.
La présentation du rapport a été suivie d’un panel de discussion réunissant des personnalités influentes, dont l’ancienne ministre Maladho Kaba et l’ancien Premier ministre Ahmed Tidiane Souaré comme modérateur. L’ancien ministre des mines, Ahmed Kanté, a mis en exergue le rôle essentiel du secteur privé comme moteur du développement.
‘’Il était d’autant plus intéressant que, d’une façon, sans ambages, il a été démontré qu’il y a une croissance de l’économie qui est tirée par le secteur minier, mais qu’au niveau de la lutte contre la pauvreté, il y avait un peu de surplace, voire un recul. C’est ce qui est paradoxal. Et définitivement, c’est le secteur privé qui doit être l’outil de développement de ce pays. Et de plus en plus, je pense que nos autorités en prennent conscience’’, a-t-il souligné.
Insistant sur l’importance du contenu local dans les grands projets, tel que Simandou, et la nécessité d’une régulation rigoureuse pour garantir que les entreprises guinéennes bénéficient de 40% des investissements, M. Kanté a rappelé la responsabilité partagée de l’État et du secteur privé pour atteindre ces objectifs.
La Banque mondiale a mis l’occasion à profit pour réaffirmer son engagement auprès de la Guinée pour appuyer ses priorités de développement à travers des projets structurants, des analyses stratégiques et un dialogue politique constructif.
Pathé BAH, pour VisionGuinee.Info
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