Dans une tribune intitulée : «Appel aux responsables, militants et sympathisants de l’UFDG : Pour la vérité, la réforme et la survie de notre idéal collectif» Joachim Baba Millimouno nous livre un récit mêlé de blessures, de fidélité militante, et d’aspiration à une réforme interne de l’UFDG.
Son texte se veut à la fois cri d’alerte et appel au sursaut. Pourtant, derrière la force des mots se dessine une posture difficilement tenable : revendiquer une opposition exigeante tout en assumant une collaboration active avec le pouvoir de transition. Une ligne floue qui interroge autant qu’elle dérange.
Le paradoxe de la double fidélité
Peut-on, dans un même souffle pour ainsi reprendre une expression qu’il utilise, dénoncer le manque de démocratie interne d’un parti d’opposition et s’aligner publiquement avec les autorités transitoires que ce même parti conteste ? Dans la même veine, peut-on affirmer servir “la patrie avant le parti”, sans reconnaître que la patrie elle-même est aujourd’hui à la croisée des chemins démocratiques, et que la clarté du positionnement est un devoir citoyen autant qu’un impératif politique ?
M. Millimouno se revendique toujours membre de l’UFDG, tout en amusant son soutien au pouvoir. Or, c’est précisément cette duplicité de l’engagement qui affaiblit la portée de son message : comment incarner un appel à la réforme si l’on s’exonère des exigences de cohérence dans ses propres choix politiques ?
L’indignation à géométrie sélective
Dans sa tribune, Joachim Baba Millimouno critique à juste titre certaines dérives internes qui affaiblissent la dynamique démocratique d’un parti ayant pourtant été, au cours des vingt dernières années, un modèle en la matière.
Pourtant, cette dénonciation semble s’arrêter là où commence son soutien au CNRD au pouvoir. À aucun moment ne sont évoquées les carences démocratiques actuelles du régime transitoire. Pire encore, son soutien revendiqué est présenté comme un acte de courage, sans jamais en interroger les contradictions profondes. Il ne rate pas une occasion pour faire du service après-vente pour les réformes du pouvoir notamment ses tribunes sur la création de la DGE que j’ai qualifiées de lettres de motivations déguisées adressées au pouvoir.
Dans ce contexte, comment exiger des pratiques justes au sein d’un parti d’opposition tout en adhérant — sans condition apparente — à un pouvoir qui lui-même gouverne hors du cadre constitutionnel avec toutes les répressions, disparitions forcées, bâillonnement de la presse etc…qui accompagnent ce cadre.
Le dilemme moral d’un positionnement “entre-deux”
Ce que révèle en filigrane le texte de M. Millimouno, c’est la réalité difficile, voire précaire, de la condition d’opposant en Afrique, lorsqu’on est privé de ressources substantielles. C’est aussi le reflet d’un malaise générationnel : celui de figures politiques contraintes de jongler entre deux postures, maintenant un pied dans l’opposition pour conserver leur légitimité militante, tout en tendant la main au pouvoir pour survivre politiquement, répondre à leurs obligations quotidiennes ou assurer leur subsistance. Il est évident que cette stratégie est vouée à l’échec à moyen et long terme. L’exemple de Succès Massa au Tchad, toutes proportions gardées, en est une illustration parfaite. Baba Joachim Millimouno et son chef de file Ousmane Gaoual Diallo avec son arrogance de «faux prophèt» politique doivent en prendre de la graine pour se ressaisir un tant soit peu dans leur volonté d’accompagner le pouvoir vers un horizon indéfini.
En outre, cette stratégie de jongler entre deux postures, nourrit la confusion et la méfiance, tant en interne qu’auprès de l’opinion publique.
On ne réforme pas un parti depuis la marge du pouvoir. Et on ne défend pas la démocratie en piétinant la logique de cohérence qui la fonde.
Un appel à une réforme ne peut être crédible sans engagement clair et non ambigu
L’aspiration à une UFDG rénovée, plus transparente et plus inclusive, est légitime. Mais elle ne saurait être portée avec crédibilité par un acteur qui s’est affranchi du cadre collectif tout en se prévalant encore de sa légitimité militante.
Oui, la patrie doit primer sur les appareils. Mais encore faut-il être clair sur quelle conception de la patrie on sert, avec qui et à quel prix.
Diané Taliby
Adjoint à la communication UFDG France
Lire l’article original ici.