L’affaire remonte à septembre 2020. Mory Condé, qui travaillait pour Conakry Terminal, a été froidement assassiné par des bandits alors qu’il quittait le port sec de Kagbélen, son lieu de travail où il était affecté depuis à peine un mois.
Le procès de ses présumés assassins se tient au tribunal de première instance de Coyah. Placés sous mandat de dépôt depuis octobre 2020, ces prévenus ont nié en bloc les faits qui leur sont reprochés.
Lors de la dernière audience, le substitut du procureur Mohamed Aly Condé avait requis la réclusion criminelle à perpétuité avec une période de sûreté de 30 ans pour ces présumés malfaiteurs. Il s’agit entre autres d’Abdoulaye Bangoura alias Babana, considéré comme le cerveau de cette affaire, Sytan Touré alias Orange Money, et Mohamed Diakité alias Lexus, qui sont jugés en ce moment. Les 4 autres ont pris la fuite.
Rencontré au tribunal ce lundi 16 juin, Sékou Gadry Condé, le fils aîné de Mory Condé, revient sur les circonstances du drame. Affirmant qu’il craint pour sa sécurité à cause de sa proximité avec les familles des prévenus, Sékou Gadiry Condé exige l’application stricte de la loi dans cette affaire et entend témoigner lors de la prochaine audience devant le tribunal de première instance de Coyah pour exiger que justice soit rendue . Extraits…
« C’était un samedi soir, alors que je venais à peine de décrocher mon baccalauréat le vendredi 25 septembre, mon papa était tellement content qu’il m’a donné de l’argent et je suis parti acheter des habits. Il avait beaucoup de projets pour moi après mon admission. Le samedi matin, j’avais pris sa voiture pour l’envoyer au lavage. À mon retour, je l’ai trouvé à la maison. À l’heure de la prière, il m’a appelé pour aller prier ensemble, mais je ne l’ai pas suivi. Après la prière, il est revenu à la maison, nous avons mangé ensemble. Ensuite, il m’a dit qu’il allait voir ses agents au port.
À son retour, vers 23 heures, à quelques mètres de la maison, il a vu que le boutiquier de notre quartier se faisait braquer. Et il a reconnu l’un des braqueurs, Abdoulaye Bangoura alias Babana, qui venait très souvent chez nous parce qu’on est voisins. Il mangeait chez nous et nous étions très d’accord avec lui. Il lui a dit d’arrêter. Babana était avec d’autres individus et mon père n’a pas réussi à les convaincre de laisser le boutiquier. Le temps pour mon père de se retourner pour monter dans sa voiture, les amis de Babana lui ont intimé de tuer mon papa ou bien c’est lui (Babana) qu’ils allaient tuer. Ensuite, ils se sont arrêtés devant la voiture de mon père et l’ont criblé de balles.
J’étais assis à notre véranda et j’entendais les coups de feu. Quelques minutes après, j’entends les cris de gens. C’est quand je suis sorti pour savoir ce qui se passait que j’ai appris qu’on avait tué mon père. Arrivé sur les lieux, j’ai vu que mon père avait été assassiné. Son corps gisait dans une mare de sang. Et Babana était sur le lieu du crime. Ensuite, les jeunes ont barricadé la route et brûlé des pneus. La gendarmerie est venue faire le constat, puis, ils ont amené le corps de mon père à la morgue.
Le lundi 28 septembre, lors de l’enterrement, Babana était aussi présent. Après l’enterrement, un de ses amis devant lequel ils ont formé tous les plans, les a dénoncés aux autorités. Vous savez, les thugs dépassent notre maison pour aller fumer du chanvre indien. Mais mon père était généreux envers les jeunes du quartier. Il leur donnait de l’argent. »
La famille d’Abdoulaye Bangoura alias Babana souhaite sa libération
« Sa famille vient suivre le procès. Ils demandent la libération de Babana. Mais moi, ma famille n’a pas accepté que je vienne suivre le dossier parce qu’ils ont peur. Quand mon père est décédé, j’avais 20 ans. A l’époque, je ne pouvais rien. Ma famille a peur pour que quelque chose ne m’arrive. Je ne savais pas que le procès était en cours. C’est sur les réseaux sociaux que je l’ai appris. Après, je suis venu voir le procureur et je me suis présenté à lui comme étant le fils aîné du défunt. Le procureur a dit qu’ils avaient cherché ma famille, mais elle était réticente. Mais moi aujourd’hui, si c’est pour trouver les moyens ou quoi que ce soit, je suis prêt à le faire. La famille de Babana est là pour qu’il soit libéré. Moi aussi, je suis là. Parce que j’aimais mon père. Il est décédé dans les conditions les plus difficiles. Mais je remercie le Bon Dieu. Si vous voyez que je suis là aujourd’hui, c’est parce qu’il était très cher pour moi. »
S’ils sortent de prison, je crains d’être agressé, parce qu’ils m’ont vu au lieu du procès. Je viens au tribunal ici parce que je veux que justice soit rendue. Aujourd’hui, on est des orphelins. Je suis l’aîné de la famille. J’ai étudié dans des conditions des plus difficiles, mais j’ai fini cette année. Aujourd’hui, sa famille souhaite que les assassins de mon papa soient libérés. Toutes ces personnes qui sont là, nous nous connaissons très bien.
Je veux qu’ils soient punis à la hauteur de leurs faits. Personne ne peut remplacer mon père. Parce que durant les 5 ans passés, j’ai connu ce qu’est la vie. Nous avons construit au Km 36. Aujourd’hui, tout ce qui se passe, c’est à moi de gérer. Donc, je demande que justice soit rendue. Je ne suis pas là pour réclamer de l’argent. Le mort est déjà parti. Tout ce que je souhaite, c’est d’avoir un emploi stable pour subvenir aux besoins de ma famille. »
Ce qui m’incite beaucoup à être là aussi, si je savais que la justice allait faire son travail, je ne serais pas là. Mais si vous voyez que sa famille est là à suivre le procès, c’est parce qu’elle croit en quelque chose. Mais avec l’aide des bonnes volontés, ma patience et mon courage, je ne vais jamais lâcher cette affaire. Je vais suivre ce dossier jusqu’au jour où je vais rejoindre mon père. Parce que j’ai compris que la corruption commence à s’infiltrer.
Je connais bien les membres de la famille de Babana. Depuis que cet acte est passé, je n’ai agressé personne. Quand je rencontre les membres de leurs familles, même un mot de salutation, je ne leur adresse pas. A mon fort étonnement, je vois que la famille de Babana est en train de lutter pour sa libération. Je vois qu’il y a corruption et je vais me plaindre aux bonnes volontés afin que justice soit rendue ».
Djiwo BARRY, pour VisionGuinee.Info
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