Alors que le métier de forgeron tend à disparaître, son rôle reste crucial dans la fabrication d’outils agricoles et d’ustensiles de cuisine. A Dubréka, ce mardi 13 mai, nous avons rencontré Ibrahima Bah, forgeron, marié et père de deux enfants. Originaire de Ninguelandé, dans la préfecture de Pita, il exerce un métier hérité de son grand-père.
Malgré les nombreuses difficultés, Ibrahima Bah continue de marteler le fer avec passion. Dans sa forge artisanale située au quartier Kindiady, il fabrique une grande variété d’objets : burins, houes, machettes, coupe-coupe, dabas, fourneaux, et même des mortiers.
“J’ai hérité de ce travail de mon grand-père. C’est lui qui me l’a appris à Kamsar, et jusqu’à présent, il continue de l’exercer. À l’époque, j’étais très jeune. Mon père aussi est un grand forgeron. Toute ma famille pratique ce métier”, raconte-t-il avec fierté.
Au quotidien, cet artisan est confronté à une véritable course aux matières premières. “Trouver le matériel de travail n’est pas du tout facile. Parfois, on achète le fer à Sonfonia SOS, Kénien ou à Entag, mais les prix varient tout le temps. Pour le bois, on va jusqu’à Bentourayah ou Kakoulima. Là encore, nous rencontrons assez de difficultés. Avant, avec le fer, c’était plus simple. A cela s’ajoute le transport est très couteux. Mon matériel de travail tombe souvent en panne. Ce qui fait que je suis contraint d’aller chercher du bois en brousse pour le revendre, juste pour pouvoir subvenir aux dépenses et acheter du fer’’, affirme-t-il.
Faute de moyens, il travaille toujours à la main, une situation qu’il déplore. “Je travaille manuellement. Sinon, il existe des équipements mécaniques pas très chers. Ça se négocie à partir de 900 000 GNF. Par exemple, il y a la lame de scie, qui permet de couper le fer sans fournir autant d’efforts physiques. Il y a aussi une machine pour chauffer le feu. Il suffit de la brancher et d’appuyer sur un bouton. Le fer chauffe rapidement et devient rouge. Mais avec ce que j’ai ici, je suis obligé de tout faire à la main. C’est pénible”, se lamente ce forgeron.
Malgré ses faibles revenus, Ibrahima Bah tient bon. Son travail, il le vit comme un moteur de survie. “Tout ce que je gagne, c’est ici. Que ce soit pour les besoins quotidiens de ma famille ou pour aider mes parents. Hier même, j’ai envoyé un peu d’argent à ma mère. Si j’avais les machines, je pourrais produire encore plus. Je vends en gros ce que je fabrique. Des commerçants viennent acheter chez nous. Les prix varient selon la qualité du fer. Et quand je vends au détail, c’est juste pour arranger la personne”.
Avec les progrès technologiques, le métier séduit de moins en moins les jeunes. Mais Ibrahima Bah, lui, croit fermement en sa valeur, et invite la jeunesse à ne pas l’abandonner.
“Il y a des parents qui refusent que leurs enfants fassent ce métier. Ils le trouvent archaïque. Aujourd’hui, ce sont les blancs qui fabriquent des outils qu’ils nous revendent très cher ici. Et ce n’est même pas solide. Tu utilises une fois, la deuxième fois, c’est foutu. Moi, je dis aux jeunes de ne pas avoir honte. Qu’ils fassent ce travail. Ils verront tôt ou tard les retombées. Gagner la dépense devient plus facile. Et si tu travailles bien, tu peux te construire une maison, acquérir des biens matériels”, conseille-t-il.
A l’approche des grandes pluies, ce forgeron entend s’offrir un abri adéquat pour continuer à mener ses activités. “Sinon, mon travail risque d’être impacté. Comme vous voyez, je travaille à l’air libre. Si je peux récupérer une bâche de camion, je mettrai du bois de chaque côté et poserai la bâche dessus. Parce que je n’ai pas encore les moyens de construire un vrai atelier. Je demande à l’État pour nous aider à professionnaliser ce métier, afin d’en tirer un meilleur rendement”, plaide-t-il.
Djiwo BARRY, pour VisionGuinee.Info
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